Borso d’Este, mécène de nombreux artistes, contribua à enrichir sa ville de ce que l’on considère aujourd’hui comme des chefs-d’œuvre de la Renaissance. Une manière pacifique d’accroître son propre prestige et d’affirmer son pouvoir.

On l’appelait alors « jardin des délices » ou encore « cour des merveilles ». Au XVe siècle, Ferrare était probablement les deux à la fois : un endroit où vivre avec insouciance la vie de cour, et où il était possible de croiser quelques-uns des plus grands artistes et ingénieurs de l’époque, depuis les peintres Piero Della Francesca, Pisanello, Mantegna ou Cosmè Tura, jusqu’à l’architecte Leon Battista Alberti. Ce n’est pas un hasard si, au cours de ce que l’on considère comme son siècle d’or, la ville devint l’une des capitales européennes de l’art et de la culture ; et elle se transforma tellement du point de vue urbanistique qu’elle est maintenant considérée comme le premier véritable centre urbain au sens moderne. Les rues étroites et les édifices qui les surplombaient, typiques de l’époque médiévale, laissèrent la place à la ville de la Renaissance, aérée, ordonnée et « idéale », que nous pouvons encore admirer aujourd’hui. Les promoteurs de ce changement, qui fit de Ferrare l’un des ateliers les plus actifs de la Renaissance italienne, furent les princes qui se succédèrent au cours du XVe siècle : Nicolas III d’Este (1393-1441) et ses fils Lionel (1441-1450), Borso (1450-1471) et Hercule (1471-1505), véritables acteurs de la grande époque du mécénat de Ferrare.

Pour la gloire. Le mécénat de la famille d’Este n’était pas désintéressé, loin d’être dicté uniquement par l’amour de l’art, de la culture ou de la beauté, mais plutôt motivé par des intérêts bien précis liés à la gestion du pouvoir. À la Renaissance, en effet, le faste, l’ostentation du luxe et de la richesse, le fait de savoir impressionner les visiteurs et étonner ses propres concitoyens par la construction de somptueux édifices et l’acquisition de précieuses œuvres d’art était considéré comme une partie du bagage que tout bon prince devait posséder. C’étaient des attributs fondamentaux du pouvoir. Avoir les moyens de se permettre les services d’artistes, verser des commissions et des financements, indiquait le degré de prospérité du seigneur et de ses domaines. Que cette prospérité ne fût qu’apparente et financée par les sujets, soumis à des impôts de plus en plus importants, comptait peu. L’essentiel était l’image que la ville et son prince parvenaient à donner. Une seigneurie prospère et tape-à-l’œil était, dans les faits, plus facilement respectée et redoutée par ses alliés comme par ses ennemis.

Roberto Rovela / Focus Storia

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