Comment travaillait-on dans un atelier d’art florentin ? Quels rapports ces jeunes hommes qui s’appelaient Leonardo ou Botticelli entretenaient-ils entre eux ? Et comment l’art était-il transmis, dans le berceau de la Renaissance ?

Névrosés, passionnés et enthousiastes, particulièrement sensibles, sujets à des colères soudaines et à des sautes d’humeur, amateurs, pour la plupart, de solitude et de silence : dans le XVe siècle florentin, comme aujourd’hui, les artistes étaient considérés comme des personnes au caractère excentrique, capricieux et extravagant. Mais ne les imaginons pas propriétaires d’élégants ateliers, couverts de gloire, ou snobs amphitryons au moment de leur dernière exposition personnelle. Non, les artistes de la Renaissance, présents à Florence entre 1430 et 1530, étaient des « ouvriers du beau », et leur atelier était un lieu où le travail s’organisait comme dans une petite entreprise familiale, reparti entre apprentis, commis et assistants.

On ne pouvait y échapper, pour tenter sa chance dans l’art, il fallait mettre les mains à la pâte. Même un génie comme Léonard de Vinci passa plusieurs années cantonné dans un atelier florentin : celui, célèbre, d’Andrea del Verrocchio. Et il ne fut pas le seul « grand » à en sortir : dans le plus important atelier de la Seigneurie des Médicis, navire-école des meilleurs artistes florentins de la Renaissance, grandirent en effet le sculpteur Gianfrancesco Rustici, des peintres comme Pietro Perugino, Domenico Ghirlandaio et, pendant une courte période, Sandro Botticelli. Qu’avait donc de si particulier l’atelier de Verrocchio ? Principalement la polyvalence. Andrea avait fait son apprentissage chez un orfèvre et il possédait des connaissances techniques utiles tant dans le domaine de la peinture que dans celui de la sculpture. En se fondant sur sa propre expérience, il fit un choix décisif : tandis que ses collègues essayaient de se protéger de la concurrence spécialisée dans certaines activités, il opta, dans son atelier, pour l’éclectisme. Peinture, sculpture, orfèvrerie : l’atelier de Verrocchio produisait des œuvres en tout genre. Et s’il n’était pas occupé sur un chantier, le maître travaillait chaque jour avec ses apprentis, tant que la lumière le permettait, au milieu d’un mobilier que quiconque n’était pas du métier aurait jugé pour le moins extravagant. D’un côté, les châssis en bois avec des fils tendus pour former une grille quadrillée, qui servait à étudier la perspective des objets et des figures à représenter sur le tableau ; de l’autre, les outils pour la fusion du bronze, les matériaux nécessaires à la préparation des cartons pour les fresques, les pinceaux et les peintures à la détrempe. Éparpillés ici et là, des mannequins, souvent recouverts de tissu, pour observer les drapés et les diverses attitudes du corps humain.

Maria Leonardi Leone

Abonnement à RADICI