Les images des conteneurs débordants de déchets à Rome ou à Naples sont tristement célèbres dans le monde entier. Dans la capitale, la question des déchets est désormais tellement ancienne qu’elle en est devenue proverbiale. Pourtant, la réalité derrière les apparences est plus complexe et pas toujours négative. Il suffit de savoir, par exemple, que l’Italie est l’un des fleurons en Europe pour le tri sélectif. À quel moment, alors, le mécanisme se grippe-t-il ?

Recyclage organique des déchets alimentaires destinés au compostage, verre, acier et aluminium, papier et carton, plastique, déchets non recyclables. Respectivement : marron, vert, turquoise, jaune, bleu et gris. Une palette de couleurs qui campe désormais dans les cuisines et les débarras des maisons des Italiens qui vivent dans des communes pratiquant le tri sélectif au porte-à-porte. Une couleur pour chaque conteneur, soumis à un calendrier bien précis, qui indique quel jour il devra être laissé sur le pas de la porte afin d’être vidé par l’entreprise chargée du traitement des déchets urbains. Les conteneurs du porte-à-porte font désormais partie du quotidien de 73 % des familles italiennes. Un casse-tête pour les touristes, mais une manne pour les communes qui se sont ainsi libérées des conteneurs malodorants et tristement célèbres dans les rues.

Dans les communes qui pratiquent le porte-à-porte, parmi lesquelles dominent par leurs dimensions Milan et Naples, le tri sélectif a concerné en 2020 jusqu’à 80 % de la production des déchets urbains, ceux produits par les citoyens, permettant ainsi d’en recycler une grande partie. Et si le succès d’une telle option repose sur la conscience citoyenne des habitants, elle est grandement stimulée par le risque d’une sanction en cas d’erreur, qui peut varier de 25 à 620 €. Après une période d’adaptation, si l’on observe les données ISTAT de 2021, les Italiens se sont révélés dans l’ensemble contents du choix du porte-à-porte : le pourcentage des familles satisfaites de cette solution dépasse les 60 %.

Grâce à ce système, le tri sélectif est appliqué en moyenne sur 63 % des déchets urbains et les familles qui trient leurs propres déchets sont aujourd’hui plus de 90 %. Dorénavant, nous sommes devenus des experts : hésiter encore sur quel conteneur utiliser pour jeter le Tetra Pak, ou jeter dans le papier le ticket de caisse du supermarché sont des erreurs de dilettante.

Sur 27 pays européens, seuls neuf parviennent à recycler plus de 30 % de leurs déchets, la Slovénie (57 %) et l’Allemagne (48 %) figurant en tête de classement. L’Italie fait partie des plus vertueux, recyclant 30,4 % de ses déchets urbains et parvenant à en récupérer (en comptant aussi le compostage et la récupération d’énergie dans les thermo-valorisateurs) jusqu’à 76,5 %. La France, quant à elle, recycle 24 % de ses déchets, mais elle en récupère en tout 74 %.

Malgré son efficacité dans le tri sélectif, le comportement vertueux italien perd de sa force dans les phases qui suivent. Par exemple, il n’y a pas assez d’usines de traitement pour les déchets recyclables et non recyclables sur le territoire. Même si l’Italie compte 6 456 usines de valorisation, seconde en Europe après l’Allemagne, il s’agit en réalité surtout d’usines de petite ou moyenne dimension et situées, pour la plupart, dans le Centre-nord du pays. 22 % des structures sont même situées en Lombardie. Pour cette raison, en 2021, plus de 659 000 tonnes de déchets urbains ont été exportés – soit une augmentation de 13 % par rapport à l’année précédente – surtout vers l’Autriche, le Portugal et l’Espagne.

Parmi les situations les plus problématiques, il y a sans aucun doute celle de Rome : l’absence pesante, dans la capitale, d’un système de traitement des déchets, revient régulièrement à l’ordre du jour. À ce jour, le maire de Rome, Roberto Gualtieri, a stipulé un accord avec les Pays-Bas : chaque semaine, 900 tonnes de déchets urbains quitteront la capitale italienne pour être transportés et traités à Amsterdam, à plus de 1 300 kilomètres de distance, en attendant l’inauguration du thermo-valorisateur de Rome prévue pour le mois de juillet 2026.

L’usine sera en mesure de traiter jusqu’à 600 000 tonnes de déchets par an. Encore un pas en avant pour un pays qui fait déjà la différence en matière de tri sélectif.

Plus de publications

Née en 1991 à Lanciano, Francesca Vinciguerra a récemment obtenu son diplôme en littératures française et européenne dans les universités de Turin et de Chambéry, avec un mémoire en littérature post-coloniale française. Depuis septembre 2016, elle vit à Toulouse, ville où elle a entrepris une collaboration avec la revue RADICI et a terminé un service civique avec l’association de musique baroque Ensemble baroque de Toulouse.