Les livres à son sujet se succèdent et, paraît-il, se vendent. Le magazine « Le Point » vient de lui consacrer sa Une et un dossier d’une vingtaine de pages. Ce petit-fils d’immigré italien né en Argentine est revenu aux sources dans la cité éternelle, en son cœur même, au Vatican. Mais personne ne sait vraiment qui est le Pape et où il va…

Il devait révolutionner l’église. Au moment de son élection et de se révéler à son peuple, de son balcon, place Saint-Pierre, il ne voulait aucune tenue d’apparat. Un jésuite qui a refusé les appartements officiels pour d’autres plus modestes et communautaires. Un ancien cardinal qui se déplaçait en métro. Quelqu’un qui reçoit tout le monde, petits ou grands, démocrates ou dictateurs, sans distinction, comme une main tendue, au risque d’incidents diplomatiques ou dogmatiques. Bergoglio est aussi décrit comme un piètre DRH, passant le rare temps où il le réunit à sermonner son état-major.

Là où on ne l’attend pas

Mais sa révolution aujourd’hui, où est-elle ? Et surtout, lui, qui est-il ? Que veut-il représenter ? Si nous l’attendons toujours en France, comme de nombreux autres états européens de premier plan, il a tracé son sillon qui le mène vers les déshérités de nos temps modernes : les migrants. Lampedusa, Ciudad Juarez, Lesbos… Voilà où l’on a vu le Pape. Là où il devait être finalement, plus que dans les salons de velours romains ou des diplomaties internationales. Sans doute aussi, s’est-il souvenu d’où il venait lui-même petit-fils d’émigré italien parti tenter sa chance en Amérique du Sud.

Soutenir les migrants n’a pas bonne presse en Italie actuellement. Mais François n’en a cure, si je puis me permettre l’expression. Que pense de lui cette Italie si Catholique aux crucifix encore présents dans les salles de classe, ce pays aux processions encore si sacrées et fréquentées ? Son appel à l’aide pour les migrants est contrebalancé, dans le cœur d’une nation qui vient de porter en 1ère ligne de l’échiquier politique la Ligue, par une autre de ses valeurs cardinales : la famille. Se souvenir du chemin parcouru, parfois d’un pays à un autre, et de sa famille, tout cela nous ramène à quelque chose de très fort pour nous tous ici, les racines.

Pas éternel

Ainsi donc il serait des nôtres. Mais qu’en est-il du réformateur qu’on nous annonçait ? Quelle place pour la femme dans l’église catholique ? Où sont les mesures fortes attendues contre les prêtres pédophiles ? Et que dire des dossiers courants : place des divorcés, débat sur la contraception ou l’avortement, … Ce pape fera-t-il un jour réellement bouger les lignes ? Il n’a, hélas pas l’éternité pour cela. Même si encore plus vigoureux que ces deux prédécesseurs, François aura 82 ans à la fin de l’année.

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Patrick Noviello est journaliste à France3 Occitanie. Il enseigne à l’Ecole de Journalisme de Toulouse dont il est issu. Il collabore à Radici depuis 2012. Sa dernière conférence théâtralisée « C’est moi c’est l’Italien » aborde, à travers l’histoire de sa famille, les questions liées aux migrations.