Ces dernières semaines ont été difficiles pour nous tous. Terribles. La dernière chose dont nous avions besoin, c’était bien d’une nouvelle guerre, qui plus est, aux portes de chez nous. La soif de pouvoir a rendu les hommes aveugles, assassins et victimes d’un conflit fratricide, qui nous empêche de saisir la chance que nous avons de pouvoir jouir de notre planète et de ses trésors. En ces jours obscurs, nous nous sommes demandé plusieurs fois ici à RADICI quoi écrire, que choisir pour ces nouvelles pages. Et comme aucun choix n’est juste à 100 %, nous nous sommes dit qu’il valait sans doute la peine d’aller à contre-courant. Alors pas de guerre, non, mais lumière du soleil, ciels bleus, voyage. À l’approche de l’été, nous avons tous un désir immense de laisser derrière nous le repli sur soi, l’immobilité et la tristesse de ces dernières semaines.

Ainsi, nous avons décidé de retourner sur les routes de ce merveilleux pays qu’est l’Italie. Pourtant, ce ne sont pas tant les destinations qui nous intéressent cette fois, mais bien le voyage en lui-même. Avec cet itinéraire singulier, Biagio Picardi nous invite à nous remettre en chemin. Me viennent alors à l’esprit les paroles d’une chanson de Claudio Baglioni, que certains d’entre vous connaissent peut-être, Strada facendo, qui sonne comme un parfait accompagnement dans notre lecture : Strada facendo vedrai / Che non sei più da solo / Strada facendo troverai / Un gancio in mezzo al cielo / E sentirai la strada far battere il tuo cuore / Vedrai più amore, vedrai. (Chemin faisant, tu verras que tu n’es plus seul, tu pourras t’arrimer au milieu du ciel, tu sentiras la route faire battre ton cœur, tu verras plus d’amour, tu verras.)

Voilà. Imaginons simplement nous mettre au volant d’une voiture et descendre le long de la Botte. Il y a des routes, en Italie, qui semblent faites exprès pour rêver : des tronçons panoramiques, à pic sur la mer, de doux lacets qui traversent des collines enchantées ou frôlent des falaises, des virages accrochés à des éperons rocheux qui défient les lois de la gravité, des voies qui percent la montagne pour se détacher ensuite vers le ciel. La route qui nous mène à la découverte d’une merveille vaut en elle-même le voyage. Le long de routes comme celles que nous vous proposons dans ce numéro, l’aventure est assurée, et peu importe que ce soit en voiture, en moto ou en camping-car, vivre lentement devient un plaisir, sans être pressé d’arriver. Laissez-vous inspirer par le parcours, comme quand, par exemple, un panneau en bord de route vous signale la présence, à quelques kilomètres, d’un monument, d’un lac, ou même vous indique simplement « vendita pomodori », ou « sagra del tartufo ». C’est là que se nichent souvent les plus belles expériences. Il n’y a pas humain plus sage que celui qui, voyageant, a changé vingt fois la forme de sa pensée et de sa vie. Parce qu’en voyage, la meilleure chose, c’est de se perdre.

En accompagnement de notre itinéraire, Alessandra Pierini, infatigable promeneuse gastronomique, nous propose les parfums enivrants du street food à l’italienne. Comme nous le disions, les meilleures choses nous attendent parfois au bord d’une route provinciale peu fréquentée, ou dans un bar où, entre deux bavardages avec les habitués et un café au comptoir, un habitant du lieu nous conseille le bon endroit pour goûter les plaisirs de la véritable cuisine de la région, la sagra dell’arancino en Sicile, le délicieux cuoppo de friture de poisson sur la côte amalfitaine, ou bien un sandwich au lampredotto sur les routes des cyprès toscans. Il suffit parfois de cela pour transformer nos vacances en un véritable voyage et donner du goût à leur destination finale, lentement méritée.

Nous poursuivons ensuite, toujours sous la plume de Marco Tullio Giordana, notre plongée au cœur des trois décennies qui ont façonné l’Italie contemporaine, racontées au prisme de son industrie automobile (et cinématographique, bien entendu). Épisode 2 : les années soixante.

Puis nous continuons notre voyage au cœur des plus beaux airs de l’opéra italien aux côtés de Pierre Cadars qui consacre cette étape au compositeur Ruggero Leoncavallo (1857-1919) et à son œuvre la plus célèbre, emblématique du mouvement artistique vériste et de son désir de représenter la réalité : Pagliacci.

Pour la rubrique Émigration, Marie-Claude Blanc-Chaléard nous rappelle qu’au-delà des métiers de la construction, les Italiens ont laissé une empreinte essentielle dans l’industrie du meuble du faubourg Saint-Antoine à Paris, transformant en profondeur l’activité et le quartier.

Enfin, il sera également question de sport avec deux articles sur les thèmes du calcio et de la non-qualification de la Squadra Azzurra à la coupe du monde 2024, et du cyclisme à l’occasion du 105e départ du Giro en mai 2022.

Pour finir, le soixantième anniversaire de l’une des bandes dessinées italiennes les plus connues et les plus lues : Diabolik, créée en 1962 par les sœurs Giussani.

En ce qui me concerne, je vous souhaite paix et sérénité, et vous invite à ne jamais renoncer à l’esprit critique, nécessaire en ces jours difficiles, et qui nous permet de ne pas tomber dans le piège du tout blanc ou tout noir. Efforçons nous, encore et toujours, de voir le monde haut en couleurs, comme celles de l’Italie.

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Rocco Femia, éditeur et journaliste, a fait des études de droit en Italie puis s’est installé en France où il vit depuis 30 ans.
En 2002 a fondé le magazine RADICI qui continue de diriger.
Il a à son actif plusieurs publications et de nombreuses collaborations avec des journaux italiens et français.
Livres écrits : A cœur ouvert (1994 Nouvelle Cité éditions) Cette Italie qui m'en chante (collectif - 2005 EDITALIE ) Au cœur des racines et des hommes (collectif - 2007 EDITALIE). ITALIENS 150 ans d'émigration en France et ailleurs - 2011 EDITALIE). ITALIENS, quand les émigrés c'était nous (collectif 2013 - Mediabook livre+CD).
Il est aussi producteur de nombreux spectacles de musiques et de théâtre.