La scène se passe au petit matin dans la salle de petit déjeuner d’un hôtel parisien. Deux hommes d’origine arabe, qui viennent de se faire présentés par un ami commun, dialoguent en italien. Ils le font de la manière la plus naturelle du monde, comme s’ils se connaissaient depuis une éternité ou comme si cette langue leur avait toujours été commune et usuelle. Et moi assis là, à les écouter, je les comprends. Curieuse scène… Rien ne nous rapproche le moins du monde. Ils sont parisiens, je suis provincial. Je ne les connais pas, je ne suis pas un habitué des lieux et pourtant nous avons un langage commun.

Le monde est un village a-t-on désormais l’habitude de dire. Je n’en suis pas si sûr. Nous aimons trop nos repères et ce qui nous est familier, pour vivre dans une cité de 36 000 kilomètres de circonférence. En revanche, nous voyageons de plus en plus, et comme ce que nous aimons, hommes, tendances, objets, cultures, s’exporte de plus en plus, nous finissons par nous retrouver partout chez nous. Quel incroyable paradoxe…

Evidemment chaque être garde sa propre perception des choses. Par exemple, ce mois-ci dans Radici, Dominique Fernandez, vous offre une autre vision de Rome que celle de mes chroniques de la saison passée. Quand je parle de la Toscane à une personne originaire de là-bas, nous n’avons évidemment pas le même regard de cette contrée. Je n’en ai pas forcément la même connaissance que lui, ou alors la mienne est peut-être plus encyclopédique mais, au fond, moins concrète et enracinée.

La semaine dernière, j’ai enregistré une émission au Salon de l’Agriculture. On y a beaucoup parlé de l’origine des produits exposés mais aussi de « terroir ». Ces repères donnés aux consommateurs les rassurent, leur permettent même parfois d’accepter de payer plus le producteur pour s’en délecter. En agriculture, on va même jusqu’à protéger l’origine de certains produits. Et c’est une bonne chose quand on voit ce qui est arrivé à la mozzarella et la manière dont son savoir-faire a été détourné…

Sans se renfermer sur son identité et dénigrer les autres, il est toujours bon de connaître son origine, sa particularité, pour pouvoir les défendre si besoin, mais aussi et surtout pour continuer à les faire vivre. L’histoire de notre immigration par exemple continue de vivre en public avec Gruppo Incanto. Elle se retrouve aussi racontée dans des ouvrages ou films divers et variés, comme dans ces chroniques que vous lisez sur mon blog, …

La semaine écoulée encore, j’ai lu pour mon travail, mais aussi par plaisir, bon nombre d’articles politiques. Il y était question de l’implosion possible du Parti Socialiste, de ligne politique, de la manière dont était gouverné le pays. L’un de ces articles se terminait par une citation du fondateur du Parti Communiste italien, Antonio Gramsci. Je vous la livre également en guise de conclusion : « Celui qui ne sait pas d’où il vient ne peut savoir où il va ».

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Patrick Noviello est journaliste à France3 Occitanie. Il enseigne à l’Ecole de Journalisme de Toulouse dont il est issu. Il collabore à Radici depuis 2012. Sa dernière conférence théâtralisée « C’est moi c’est l’Italien » aborde, à travers l’histoire de sa famille, les questions liées aux migrations.