Le hashtag de Matteo Salvini est sans équivoque : #Chiudiamoiporti. Simple comme un slogan raciste. Seulement, il n’est pas le seul à fermer les ports, et les portes. Le nouveau Ministre de l’Intérieur italien renvoie aussi la responsabilité à la France qui a rendu hermétique aux migrants sa frontière avec l’Italie. Alors il est forcément compliqué de donner des leçons au gouvernement de la péninsule mais dans tous les cas ne faisons pas les surpris.

Pour le porte-parole de LREM, « l’attitude de l’Italie vis à vis de l’Aquarius est à vomir », le Président de la République française a dénoncé « la part de cynisme et d’irresponsabilité du gouvernement italien ». Mais quand Messieurs Macron et Conte se retrouvent, la diplomatie reprend le dessus, ses compromis aussi et finalement tout cela serait la faute de l’Europe. Qu’il est toujours bon d’invoquer l’UE quand on a besoin d’elle comme d’un paratonnerre. De son côté, un autre italien, le Président du Parlement Européen, Antonio Tajani, n’hésite pas à clamer que « l’immigration met en péril la survie même de l’Union Européenne ».

Personne n’a aidé l’Italie à accueillir

Que retenir de tout cela finalement ? Un flot de banalité. Bien entendu que personne n’a réellement aidé l’Italie quand elle a dû faire face à l’afflux de migrants sur ses côtes (700 000 depuis 2013). Bien sûr qu’on ne pouvait attendre une autre position de son nouveau gouvernement de coalition, désormais pour moitié aux mains d’un parti xénophobe, la Lega. Ainsi Olivier Roy, professeur à l’Institut universitaire européen de Florence résume-t-il la situation dans les colonnes de l’Obs.

« Le Mouvement 5 étoiles n’a aucune référence de type fasciste, ses membres sont plutôt ouverts sur les questions de société, mais comme ils sont dans une sorte de « virginité historique » (les cadres sont très jeunes) ils voient la relations avec l’extrême droite comme une histoire de négociation d’un contrat de gouvernement, où ils délèguent la question des immigrés à Matteo Salvini pour mieux se concentrer sur leur promesse démagogique de revenu universel supposé être financé par Bruxelles ».

Faire du social mais pour les siens

Faire du social mais avant tout pour les siens. Voilà un message qui passe bien auprès des électeurs. L’opinion publique italienne n’a pas apprécié que le Président français lui donne des leçons. Alors elle se met à soutenir son gouvernement même s’il est codirigé par un Salvini qui a « nationalisé son discours raciste » comme l’affirme Jean-Luc Pouthier dans les colonnes de la revue Etudes.

Dans une analyse intitulée « Italie, les dangers du populisme », le journaliste et historien explique comment le pays en est arrivé à sa situation politique actuelle. On y apprend notamment qu’en avril dernier, le revenu moyen des espagnols est passé au-dessus de celui des italiens. « Des italiens qui, dit-il, ont consenti beaucoup de sacrifices » notamment liés aux critères économiques de Bruxelles.

Une campagne faite contre l’immigration

Des italiens qui, contrairement aux français ou aux espagnols, découvrent depuis peu les vagues migratoires, plus habitués à devoir quitter leur pays qu’à accueillir des étrangers. Pas étonnant donc que face à une population déstabilisée par ce phénomène, 5 étoiles et Lega aient en grande partie fait campagne sur cette inquiétude, qu’ils l’aient emportés et qu’ils ferment aujourd’hui le pays.

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Patrick Noviello est journaliste à France3 Occitanie. Il enseigne à l’Ecole de Journalisme de Toulouse dont il est issu. Il collabore à Radici depuis 2012. Sa dernière conférence théâtralisée « C’est moi c’est l’Italien » aborde, à travers l’histoire de sa famille, les questions liées aux migrations.