Dans mon long et très lent apprentissage de la langue italienne, je parcours régulièrement, tel un escargot, la presse transalpine. Un soir, dépité de mes progrès, je me suis mis à observer les images, comme le font souvent  les enfants qui apprennent à lire. Et là, mon regard s’est concentré petit à petit sur les publicités.

Sont-elles vraiment différentes d’un pays européen à l’autre ? Reflètent-elles la culture ou les tendances des nations dans lesquelles elles sont diffusées ? Je me garderai bien de faire de grandes théories sociologiques sur la question, mais je me suis quand même amusé à imaginer ce qu’elles me renvoyaient comme images de l’Italie.

Pleines pages de mode

La mode évidemment s’avère omniprésente dans les réclames que je parcours. Je ne vais pas citer les marques, dont beaucoup me sont inconnues, comme pour tous ceux, qui comme moi, ne s’habillent pas dans les enseignes de luxe. D’ailleurs, je me suis toujours demandé pourquoi elles s’affichaient autant dans la presse généraliste qui, a priori, ne réunit pas forcément le cœur de cible des grandes maisons.

Mais en Italie, pays de confection, pays de bon goût, où l’envie d’être bien habillé se voit plus que la situation sociale de chacun, l’inspiration des grandes maisons, se jauge à même la rue. Lors de mon dernier passage à Rome notamment, j’ai été frappé, moi grand amateur de chaussures, par l’esthétisme des souliers portés par tout un chacun, peu importe les quartiers ou la situation sociale.

Devenez glacier

Au pays des glaciers, quoi de plus naturel de voir cette pub pourtant étonnante de prime abord : « Apri la tua gelateria con solo 4900 euros » (“Ouvrez votre magasin de glaces pour seulement 4900 euros”). En France, pays du bon pain, je n’ai jamais vu d’annonce proposant d’ouvrir sa boulangerie…

En revanche, une idée battue en brèche parmi mes caricatures mentales du pays de « la dolce vita » : celle selon laquelle il y fait toujours chaud. Médicaments contre le rhume, poêles à bois, toute l’armada de produits proposés traditionnellement, l’automne venue, trône dans le Corriere della sera ou La Republica.

La culture a un prix

L’Italien serait-il plus joueur que le français ? Pas sûr… En page « Sport » sous les grandes affiches du Calcio, un encart pour un site de pari en ligne. En pages « culture », toutes les grandes expos voient leurs affiches accompagnées du logo d’un sponsor, marque de café ou là encore de vêtement de luxe. Le mécénat bat son plein des deux côtés des Alpes, même s’il sauve plus de grands monuments en Italie qu’en France.

Quant aux banques, elles prennent peut-être moins d’espaces qu’en France mais souvent des pleines pages, comme pour affirmer que, sans elles, tout le reste ne fonctionnerait pas… Et n’oublions pas la voiture, dans la patrie de Ferrari et Bugatti, ce serait une offense. Dans l’Espresso, on découvre une somptueuse Maserati, « a partire da 68000 euros ». Allez, je laisse là l’univers de la démesure, et retourne à mon italien.

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Patrick Noviello est journaliste à France3 Occitanie. Il enseigne à l’Ecole de Journalisme de Toulouse dont il est issu. Il collabore à Radici depuis 2012. Sa dernière conférence théâtralisée « C’est moi c’est l’Italien » aborde, à travers l’histoire de sa famille, les questions liées aux migrations.