Pour mes quarante ans, mes amis et ma famille ont eu la formidable idée de m’offrir quinze jours inoubliables à Rome. Les paroles s’en vont, les écrits restent. Alors je leur raconte et vous raconte ce séjour à travers ces chroniques.

Le chemin de fer italien n’est pas réputé pour sa modernité. Mais ses gares, du fait de leur ancienneté justement, sont restées attachantes et parfois même impressionnantes à l’image de celle jouxtant la station de métro Pyramide que je découvre ce matin. Elle amène tout droit aux plages romaines du Lido et d’Ostia.
Mais pas de parasol et sable pour moi, cap plutôt sur le Testaccio. Ce quartier figure sur tous les guides mais peu de touristes s’y aventurent. Je débute ma déambulation en me dirigeant vers le Nuovo Mercato. Me voilà le long de la via Galvani où se nichait autrefois justement l’ancien marché à ciel ouvert. Aujourd’hui, elle n’est plus qu’une de ces nombreuses routes cabossées de la ville où scooters et voitures s’élancent à vive allure.

Avant elle, j’ai parcouru l’austère via Zabaglia bordée en partie par le majestueux cimetière « Acattolico » d’un côté et celui des soldats britanniques de l’autre avec quelques remparts antiques, le tout au pied de l’abrupt Monte Testaccio.

Le « Nuovo Mercato » s’avèrera finalement une simple halle flambant neuve où la vie d’antan ne retrouvera jamais pied même si la clientèle du quartier s’y presse sans s’y arrêter vraiment. J’y ferai une halte dans le café central, un ristretto pris à la va-vite sur une table en plastique, juste le temps de prendre quelques notes et d’essayer de déchiffrer quelques visages.

 

A peine sortie du mercato, me voilà face à une usine désaffectée. Elle abrite désormais une école de musique où les jeunes convergent et une antenne du Musée d’Art Contemporain de Rome, le MACRO, déserte. Cette dernière est fermée le matin. Dommage, nouvelle déception après celle du marché. Mais il ne faut jamais renoncer, la suite va me le démontrer.

 

Je m’égare (ma spécialité) et me retrouve errant, sur le Lungovere, grouillant de véhicules déchaînés. Rome nous habitue mal à longer de grandes artères tant tout y est accessible en son centre. Le soleil cogne de plus en plus au fur et à mesure que j’approche du carrefour de l’Emporio.

 

Je traverse la via Marmorata et pars à la conquête de l’Aventin. Une bien curieuse ascension s’offre à moi au beau milieu d’immenses demeures cossues, perchées sur cette colline. Incroyable trajet que j’effectue via di Porta Lavermale, j’y passe même devant l’Ambassade d’Egypte. Au bout de la rue, la célèbre villa du prieuré de Malte, siège historique de l’ordre, micro-état, trente-six fois plut petit que le Vatican.

Les quelques touristes que je croise à nouveau, se pressent devant la porte d’entrée du domaine. Si l’on regarde à travers sa serrure, et jusqu’au bout d’une allée de Cyprès parfaitement alignés, on y tombe pilepoil dans l’axe du dôme de la basilique Saint-Pierre. Laissons cette vision certes magnifique mais recensée dans tous les guides pour tourner à gauche et contempler Sant’ Anselmo.

Je ne traîne pas, la ballade est encore longue et le soleil brûle de plus en plus. Je hâte le pas pour trouver un peu de fraîcheur dans le parco Savello. Utilisé par les enfants comme un jardin public ordinaire, il offre pourtant sans doute l’un des plus beaux points de vue sur la ville. Les gamins y jouent au foot en éclatant au passage les impressionnantes oranges tombées des arbres. L’endroit est donc, en plus d’être beau, parfumé !

 

J’en ressors rêvassant et attaque ma descente vers le Circo Massimo quand je m’aperçois que j’ai oublié Saint-Sabine ! Demi-tour et nouvelle ascension, pour me retrouver face à ce qui ressemble à une porte close. Fausse impression, car l’endroit est quasi-désert mais ouvert. Je pousse l’immense battant en bois et m’immerge dans le calme et la splendeur, le dépouillement aussi. Pas étonnant qu’un des fondateurs de l’ordre des dominicains repose ici. Qu’il doit être bien avec à ses pieds, dernière image avant que je m’engouffre dans le métro, la roseraie communale de Rome.

Plus de publications

Patrick Noviello est journaliste à France3 Occitanie. Il enseigne à l’Ecole de Journalisme de Toulouse dont il est issu. Il collabore à Radici depuis 2012. Sa dernière conférence théâtralisée « C’est moi c’est l’Italien » aborde, à travers l’histoire de sa famille, les questions liées aux migrations.